Fin février s’est tenue la 6e soirée Étincelles de l’Université de Montréal. Destinée à saluer les achèvements exceptionnels de quatre membres de la communauté universitaire, cette soirée a permis de remercier, d’appeler à l’engagement et de rallumer l’espoir dans le sombre contexte que nous connaissons.
« On vous aime. » C’est par ces trois mots de circonstance que le recteur Daniel Jutras a ouvert la 6e soirée Étincelles. Le souvenir de la Saint-Valentin est encore frais en ce 19 février enneigé et obscurci par l’actualité. L’occasion était donc idéale pour trouver refuge et célébrer, ensemble, celles et ceux qui aiment et font aimer l’Université.
« Le monde traverse une période incertaine, anxiogène, marquée par le repli sur soi et un mépris des faits et des alliances, a poursuivi le recteur avec une certaine gravité. On vit tous ce chaos avec un peu d’étonnement et de frayeur, mais ce soir nous allons faire tout le contraire. Nous vous convions à une célébration de l’amitié, du don de soi, du sens de la communauté, du savoir et de l’espoir. »
Dans l’assistance, nos Étincelles Louise Roy, Wolf Thyma et Jacques Courtois acquiescent. Leurs accomplissements et leur altruisme, bientôt récompensés des prix de l’Engagement bénévole, prix de la Relève et prix Philanthrope, font directement écho aux mots de Daniel Jutras.
Quant à notre 4e Étincelle, le regretté Jacques Girard qui présidait l’Association des diplômés de l’Université de Montréal (ADUM), il aurait aimé être là pour annoncer lui-même son antidote aux problèmes du moment : un don de 100000 $ pour créer un Fonds de recherche sur la désinformation et ses impacts sur la démocratie. Ce n’est pas pour ce geste – si important à l’ère de la post-vérité triomphante – que l’Ordre du mérite lui sera remis à titre posthume en fin de soirée, mais il est à l’image de son engagement envers l’UdeM : sincère et passionné.
Engagée pour la culture et l’éducation

D’engagement, il a donc été beaucoup question au cours de cette soirée animée par Catherine Souffront, comédienne et ambassadrice de la grande campagne L’heure est brave. Prenez Louise Roy : ancienne chancelière de l’université et femme d’affaires émérite, notre Prix de l’engagement bénévole a consacré tout son temps libre à appuyer la culture et l’éducation sur des conseils d’administration ou en tant que bénévole.
« Son engagement a un effet considérable sur les personnes et les organisations, et j’en suis le témoin direct : c’est grâce à elle que je suis aujourd’hui chancelier de l’Université de Montréal, a raconté Frantz Saintellemy, très ému au moment de lui remettre sa récompense. Elle m’a personnellement recruté lorsqu’elle était elle-même chancelière, parce qu’elle voulait enrichir le Conseil avec une expertise en technologie. Pour moi, elle a été une mentore et une source d’inspiration. »
Revenant sur ses plus beaux souvenirs, Louise Roy a égrené au micro ses expériences en tant que présidente du Conseil des arts de Montréal, du Concours musical international de Montréal, du Centre interuniversitaire de recherche en analyse des organisations (CIRANO)… Avant de s’arrêter sur son rôle de chancelière, et sur un moment de l’année qu’elle chérissait plus que tout : la collation des grades.
« Quand un étudiant monte sur scène sous les applaudissements de sa famille, quand on lui remet son diplôme qui deviendra un formidable passeport pour l’avenir, on sait pourquoi on est là, on réalise le sens de notre engagement », s’est-elle émue.
Engagé pour les minorités

Cette quête de sens, Wolf Thyma la connaît bien également. Diplômé en droit et médecine, ce jeune homme ne compte pas son temps pour défendre la cause des minorités fragilisées et lutter contre les discriminations.
« Sa présence parmi nous ce soir démontre que rien n’est réglé, qu’il reste beaucoup à faire contre les préjugés et pour une meilleure représentation des minorités, a reconnu Simon Forest, le nouveau président de l’ADUM chargé de lui remettre le prix de la Relève. Mais cette distinction se veut un symbole. Un symbole de sa combativité et des batailles qu’il a déjà engagées.» Des batailles comme la clinique juridique de Saint-Michel pour contrer le racisme médical, ou comme son engagement pour une meilleure représentation des communautés noires à la Faculté de médecine de l’UdeM.
Invité à se souvenir de l’enfant qu’il était à son arrivée au Québec, Wolf Thyma a surtout eu une pensée pour ses parents :
« À cet enfant, je lui donnerais deux conseils : n’accepte jamais les injustices et profite pleinement des apprentissages que tes parents t’offrent. Les miens ont passé leur vie au salaire minimum, mais quand je leur ai dit que je voulais faire de la musique classique, ils m’ont payé des cours. Et ça a changé ma vie. Puis, quand je leur ai annoncé, après mon diplôme de droit, que je souhaitais faire médecine, ils m’ont répondu : “On va te soutenir jusqu’au bout”. Et ça a encore changé ma vie. Sans eux, je ne serais pas où j’en suis. »
Engagé pour la recherche fondamentale

Et puis, il y a Jacques Courtois, notre prix Philanthrope. Son engagement envers notre université est à la hauteur de sa générosité : colossal. Chargée de le présenter, Marie-Josée Gagnon a souligné l’amour qu’il voue au travail de nos chercheuses et chercheurs.
« C’est un véritable passionné d’Histoire, mais en tant que donateur, c’est comme s’il avait décidé de l’écrire en finançant la recherche fondamentale », a salué la PDG de Casacom et coprésidente de la grande campagne L’heure est brave.
Le plus grand donateur de l’Université de Montréal l’a reconnu lui-même : il tire un plaisir paradoxal de cette science qui plonge au cœur de la matière et des mathématiques. « Elle est la promesse d’immenses résultats, mais elle ne les recherche pas ! s’enthousiasme-t-il. Le savoir pour le savoir me fascine, et peu importe si je ne comprends pas ce que racontent les mathématiciens et physiciens que je soutiens. Les écouter, c’est presque une expérience spirituelle. »
Avec plus de 250 millions $ donnés à la recherche sur les nouveaux matériaux, l’innovation biomédicale et la médecine de pointe, Jacques Courtois a offert à son esprit – et à l’humanité – de quoi les nourrir pour des décennies.

Engagés pour l’Université
Plus on avance dans la soirée, plus l’évidence nous frappe : au-delà de leurs engagements respectifs, toutes nos Étincelles sont animées d’une même foi envers leur Université et son allégeance au progrès. Mais peu l’ont servie avec autant de constance que Jacques Girard. « Il avait à cœur son rayonnement et il croyait fermement en la qualité de son enseignement, se rappelle son fils Simon, au moment de recevoir l’Ordre du mérite au nom de son père. Et c’est parce qu’il était si attaché à la transmission du savoir, qu’il s’inquiétait des dérives actuelles. »
En guise d’au revoir, il a donc offert à sa chère université ce fonds pour lutter contre la désinformation. Manière pour lui de laisser une trace de son passage et un legs à la génération à venir. Déjà, son geste inspire d’autres donatrices et donateurs (l’ADUM vient de donner 5000$) qui croient en la même cause et renforcent ce rôle de rempart que doit jouer notre université. « Jacques Girard en était convaincu, conclura le vice-recteur à la philanthropie Michael Pécho, pour allumer les contre-feux qui éteindront les fausses nouvelles, rien de mieux que les étincelles du savoir. »
Ce soir-là, elles étaient quatre qui nous permettaient d’y voir clair dans l’obscurité du moment.