Directeur général du club de hockey Lightning de Tampa Bay, notre ambassadeur d’influence Julien BriseBois est autant reconnu pour ses achèvements professionnels que pour ses valeurs morales. Conscient de sa chance et reconnaissant envers son alma mater, il a fait un don de 500 000 $ lors du lancement de la grande campagne. Rencontre.
« En grande partie, les opportunités incroyables que j’ai eues, les événements incroyables que j’ai vécus, les gens incroyables que j’ai rencontrés sont le fruit du hasard. » Rares sont ceux, comme notre ambassadeur d’influence Julien BriseBois, qui attribuent leur réussite professionnelle au hasard. D’ordinaire, il n’est question que de travail, de détermination, de mérite, voire de destin pour les plus messianiques. Pas vraiment le genre du directeur général du Lightning de Tampa Bay : contrairement à beaucoup, lui parle essentiellement de chance lorsqu’il évoque son parcours. « À la bonne place, au bon moment », dit-il parfois de lui. Une conviction qui joue un rôle central dans son engagement envers les autres, son alma mater et la grande campagne L’heure est brave.
« Ça m’oblige à redonner aux suivants »
« Le hasard joue un rôle important dans le succès de tout le monde, juge celui qui a remporté deux coupes Stanley à la tête du Lightning. On a tendance à minimiser son rôle dans nos réussites parce que ça nous retire du mérite.» Et pourtant… De ses coéquipiers rencontrés en sport-études, jusqu’à ses collaborateurs dans la Ligue Nationale de Hockey dont il a gravi tous les échelons, tous ne parlent que de son intelligence, de son talent pour faire briller celui des autres et de son éthique de travail.
Mais Julien BriseBois n’en démord pas. « Des gens qui travaillent fort, il y en a un paquet. En fait, la plupart des gens travaillent fort. Pour autant, ils n’ont pas le même niveau de rémunération que moi… Je suis dans un champ de pratique où, à un certain niveau, le salaire devient… je dirais presque disproportionné. J’en suis conscient et très reconnaissant. Ça m’oblige à redonner. À redonner aux suivants, à la société, pour aider à bâtir d’autres success story comme la mienne. »
Du droit au but
« Success story ». Le mot n’est pas trop fort lorsqu’on évoque le parcours de Julien BriseBois. Dès l’âge de 10 ans, ce fan des Expos et athlète accompli le savait : il serait soit joueur dans la Ligue Majeure de Baseball, soit avocat. Le jeune homme poussera son rêve sportif le plus loin possible, mais c’est finalement le diplôme de droit à l’Université de Montréal (UdeM) qui aura gain de cause.
C’est là que le fameux hasard s’en mêle. Lors d’une entrevue dans un cabinet d’avocats début 1999, Julien BriseBois décide de présenter un article sur le droit du sport aux recruteurs. Il ne le sait pas encore, mais la firme songeait justement à démarrer une pratique dans ce domaine. Un coup de chance qui sera suivi d’un autre : le Canadien de Montréal est l’un des clients du cabinet et son directeur général, André Savard, cherche à embaucher un directeur général adjoint. Ce sera à Julien BriseBois qu’il confiera cette responsabilités.
Dès lors, celui qui n’a joué au hockey qu’au niveau récréatif va progressivement gagner le respect de sa nouvelle famille sportive. Escaladant l’organigramme du Canadien, il délaisse le légal pour s’occuper du sportif. Puis en 2010, le directeur général du Lightning vient le chercher et le nomme directeur général adjoint. Lui postulait déjà au rôle de DG du club, mais il devra attendre huit ans pour que son rêve devienne réalité. « Il voulait vraiment être impliqué dans le hockey, parce qu’il aime prendre des décisions, se souvient André Savard dans un article de The Athletic. J’aime ça parce qu’on sait à quoi s’en tenir avec lui. » Du droit au but : telle pourrait être la devise et le CV de ce juriste devenu directeur d’une franchise de LNH.
Le réflexe de donner
Cette confiance, cette passion et cette franchise jaillissent dès qu’on discute avec Julien BriseBois. Et particulièrement lorsqu’on aborde un autre sujet qui lui est cher : la philanthropie. « Quand on regarde au Canada, il y a une quinzaine d’universités canadiennes qui ont un fonds de dotation de plus de 500 millions de dollars, commence-t-il avant d’asséner : Il n’y a pas une seule université francophone dans ce groupe-là. Et ça c’est juste inacceptable ! »
En fait, le don n’est pas une option à ses yeux ; c’est une responsabilité qui vient avec le succès. « Je suis évidemment influencé par ce qui se fait aux États-Unis, où c’est un réflexe, une responsabilité pour les diplômés de faire rayonner leur université et de lui donner les moyens de ses ambitions. » Et l’ancien avocat d’enchaîner avec une vibrante plaidoirie pour l’UdeM :
Quand on regarde ce qu’est l’Université de Montréal… Quand on réalise que 25% des étudiants québécois passent par ses rangs ou ceux de ses écoles affiliées… Quand on sait que l’Université de Montréal est l’une plus grandes institutions québécoises, le plus grand centre de recherche francophone au Canada, l’une des plus grandes institutions académiques au monde… Et elle est ici, chez nous, au Québec ! Ça devrait être normal pour ses 450 000 diplômés de se sentir fiers et de vouloir redonner. On a une responsabilité, un rôle important à jouer et il faut qu’on en fasse davantage. C’est ce que j’aime dans notre campagne L’heure est brave : il y a de l’ambition et de l’audace. Si on atteint nos objectifs, on se sera donné les moyens de faire de l’UdeM l’université francophone la plus influente au monde.
Donner l’exemple
Pour donner l’exemple et inspirer d’autres diplômés, Julien BriseBois a non seulement accepté de devenir ambassadeur d’influence, mais aussi rendu public son don de 500 000 $ destiné au premier pilier de la campagne (Rehausser l’expérience des étudiantes et étudiants et développer leur plein potentiel). Pour le natif de Greenfield Park, ce n’est pas une première. Il y a trois ans, il avait déjà fait un don attaché à cette même cause : un chèque de 75 000 $ pour soutenir le programme de hockey féminin des Carabins. Mais cette fois, il a décidé de cibler d’autres projets qui le rejoignent.
Une partie de son don permettra ainsi de créer des bourses pour des étudiants de 2e et 3e cycle qui font de la recherche sur le leadership. « Parce qu’avoir de meilleurs leaders québécois aura un effet démultiplicateur sur notre société. » L’autre partie sera consacrée à la création d’une clinique juridique en droit des affaires. L’idée ? Donner la chance à huit étudiants de gagner en expérience dans ce champ d’expertise, tout en épaulant de jeunes entrepreneurs qui manquent souvent de moyens au démarrage de leur entreprise. « Les success stories qui peuvent sortir de ces programmes-là vont avoir un très gros impact social, j’en suis convaincu. »
Ceux qui connaissent Julien BriseBois disent de lui qu’il ne fait jamais rien sans intention. On veut bien les croire. À l’écouter discourir sur sa carrière dans le hockey, vanter ses joueurs et ses collaborateurs, insister sur sa responsabilité de diplômé envers son alma mater, évoquer avec passion l’avenir de l’université, on entend les mots de celui qui ne laisse rien au hasard… mais qui a l’humilité de reconnaître qu’il lui doit beaucoup. Une nouvelle fois, l’intention derrière son engagement est limpide : puisqu’il a été là au bon moment, il se doit d’avoir le cœur à la bonne place.